Ce que l\'éternel m\'a révélé...

Le Pape, le Nonce et Abekan sont-ils des agents doubles du diable?

 

 

 

 

 

Le Père DJEREKE: “Dieu nous demande pas d’être les avocats du diable”


Avant chaque rentrée pastorale, certains prêtres reçoivent une nouvelle affectation

pendant que d’autres sont maintenus à leur poste parce qu’ils n’ont pas encore achevé leur mandat qui peut courir de 3 à 9 ans. L’abbé Norbert Abekan pourrait être rangé dans le deuxième groupe puisqu’il continue d’enseigner, de gouverner et de sanctifier le peuple de Dieu qui est à la Paroisse Notre Dame de la Tendresse (NDT) de la Riviera Golf. Une paroisse qu’il anime assez bien, si on se fie au témoignage de plusieurs fidèles, même si, de temps en temps, il lui arrive de pester à juste titre contre l’entrepreneur qui, quoiqu’ayant perçu l’argent nécessaire, tarde à terminer les travaux de la nouvelle église. L’entrepreneur en question, si nos informations ne sont pas erronées, n’est personne d’autre que Mgr Antoine Koné qui, avant d’être nommé à la tête du diocèse d’Odienné, ne se privait pas de dénoncer les travers, réels ou supposés, de l’ancien régime. Comme quoi, on peut reprocher à d’autres d’être malhonnête ou de ne pas respecter la parole donnée et faire pire qu’eux, une fois parvenu au pouvoir. Nous savions donc qu’Abekan passerait l’année pastorale 2012-2013 à NDT. Ce que nous ignorions, en revanche, c’est qu’il était devenu, par je ne sais quelle action du Saint Esprit, défenseur à tout prix du nonce apostolique, du pape et du Vatican. Que tout chrétien catholique doive avoir du respect et de l’amour pour l’Église catholique est une chose indiscutable mais la question est de savoir si ce respect et cet amour ne peuvent pas cohabiter avec l’esprit critique et le devoir de vérité. En d’autres termes, un chrétien catholique peut-il et doit-il défendre à tout prix le pape, le Vatican ou l’Église, c’est-à-dire même quand ils sont dans l’erreur? Cette question, on peut l’étendre aux pays, partis politiques, ethnies, syndicats et sociétés secrètes et confessions religieuses auxquels nous appartenons: Tout y est-il catholique et donc tout y est-il défendable quand nous savons que nous avons affaire ici-bas à des hommes marqués par le péché (“pécheur, ma mère m’a conçu”, confessait le roi David dans le psaume 51) et non à des dieux? Avant de poursuivre ma méditation, je tiens à rassurer les amis, paroissiens et aficionados de l’abbé Abekan: Les lignes qui suivent n’ont pas pour objectif de lui nuire car j’ai beaucoup d’estime pour lui en raison des belles choses qu’il a réalisées et continue de réaliser ici et là. En prenant la parole ici, je ne suis animé que par le souci de la vérité; je ne désire qu’une chose: débusquer la vérité parce que l’homme-Dieu ou le Dieu fait homme en qui j’ai mis ma foi a dit qu’il est “le chemin, la vérité et la vie” (Jn 14, 6), que “seule la vérité rend libre ou libère” (Jn 8, 32) et qu’il est venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité (Jn 18, 37). À mon avis, la Côte d’Ivoire est dans l’impasse aujourd’hui en partie parce que beaucoup d’entre nous ont refusé de dire ou de faire la vérité au moment où il le fallait.

Avant de proposer ma vérité sur la question qui nous occupe ici (doit-on défendre coûte que coûte le pape, le Vatican ou l’Église catholique?), je souhaiterais revenir sur l’une ou l’autre affirmation faite par Abekan dans sa réponse au journaliste Guillaume Gbato.

Premièrement, le curé de NDT se demande si “l’honnêteté intellectuelle ne nous pousse pas à nommer nos sources” (Notre Voie du 21 novembre 2012). L’historien, l’anthropologue, le sociologue doivent dire de qui ils tiennent leurs informations. Sinon ils courent le risque d’être accusés de faire des affirmations gratuites. Le journaliste, lui, n’est pas obligé de dévoiler la source d’informations obtenues confidentiellement, dit la Charte de Munich (1971). Autrement, il mettrait en danger la vie de ses informateurs. Ces derniers pourraient subir des représailles et n’oseraient plus se confier à lui. Quand le journaliste a-t-il l’obligation de dévoiler ses sources? Si un impératif d’intérêt public le justifie. Par exemple, s’il sait qu’un attentat va être perpétré. Nous ne sommes pas dans ce cas de figure. Par conséquent, Abekan n’est pas fondé à exiger que G. Gbato révèle l’identité des prêtres ou des “vaticanistes” qui lui ont dit que la visite de Ouattara au Vatican fut un flop.

D’ailleurs, que cette visite ait été ou non un échec, où est le problème d’Abekan? Cela l’empêche-t-il de bien faire son travail? Il est des “kpakpatoya” ridicules dont nous devrions nous garder. Mais Abekan ne s’arrête pas là dans sa tentative de discréditer le malheureux Gbato. Il va plus loin en demandant aux Ivoiriens de “saluer le courage d’un chef d’État de confession différente de celle du Saint Père, de se rendre auprès de ce dernier pour recueillir conseils et avis”. Dans l’histoire des relations internationales, Ouattara est-il le premier président de confession musulmane à être allé au Vatican? Où est le courage là-dedans? Disons plutôt que c’est ce qu’il y a de plus normal entre deux États qui entretienent des relations? Que Norbert Abekan veuille exprimer sa reconnaissance à quelqu’un qui a été peut-être généreux avec lui dans le passé ou qu’il désire obtenir de lui un peu d’aide financière pour achever la construction de “son” église, chacun peut le comprendre parce que c’est humain mais cette tentative de voler au secours d’un navire qui, jour après jour, prend l’eau de toutes parts est franchement indécente et pathétique.

Une autre affirmation sujette à caution est celle où Abekan souhaite que Dieu nous aide à désarmer “nos cœurs, nos plumes, nos bombes pour que dans ce pays «Amour et Vérité se rencontrent et que Justice et Paix s’embrassent»”. Bien dit mais ce souhait est-il recevable? Non, parce qu’Abekan n’a jamais demandé plubliquement (dans l’un ou l’autre journal d’Abidjan) à ceux qui ont attaqué le pays le 19 septembre 2002 de déposer les armes qu’ils n’auraient jamais dû prendre puisqu’ils se disent démocrates. Les cœurs sont lourds parce que les “bramogos” du pouvoir continuent d’occuper illégalement des maisons qui ne leur appartiennent pas à Bouaké, Abidjan et ailleurs, parce que celui qui prend la plume pour contredire Ouattara s’expose à être enlevé, arrêté ou assassiné par ceux qui prétendent avoir pris les armes pour restaurer la démocratie. Un bon nombre d’Ivoiriens n’ont pas le cœur à la fête et la réconciliation ne leur dit rien parce que ceux qui ont décrété l’embargo sur les médicaments et la fermeture des banques n’ont pas encore ouvert la bouche pour dire que ces actes criminels n’auraient jamais dû être posés. Il n’y a pas 36 choses à faire pour que les cœurs, esprits et plumes soient désarmés. Citant le psaume 84, Abekan dit (et il a raison) que “justice et paix s’embrassent”. Notre pays ne connaîtra la paix, la vraie, que si la justice est honorée. Et honorer la justice aujourd’hui consiste ou bien à grâcier ou bien à condamner les coupables des deux camps. Or la justice qui nous est servie jusque-là est une justice partisane, une justice qui ne frappe que les pro-Gbagbo, ce qui est injuste car plusieurs chefs militaires fidèles à Ouattara sont accusés par des organisations internationales de défense des droits de l’homme de crimes de sang et de crimes de guerre. Ces chefs militaires n’étant que des exécutants , la logique et la justice voudraient que Ouattara, Soro et tous les ministres RDR rejoignent Gbagbo et ses compagnons en prison. Cette justice à sens unique qui s`exerce “aux dépens des seuls partisans de l`ex-président Laurent Gbagbo est un obstacle considérable à la réconciliation”, a averti récemment le groupe de réflexion International Crisis Group (ICG) qui est loin d’appartenir au FPI. Quand on prétend vouloir la paix et suivre Celui qui est “le prince de la paix” et “la vérité”, on ne peut se borner à souhaiter que les cœurs et les plumes soient désarmés; encore convient-il de se demander si la paix chemine vraiment avec la justice et si la justice est équitable ou non dans notre pays. Certaines personnes disent: “Nous voulons la paix, allons à la paix” mais refusent de reconnaître que la justice partisane de Ouattara est un obstacle majeur à une vraie réconciliation. Cette paix à tout prix n’est pas digne des enfants de Dieu. De la même manière, je ne crois pas que Dieu nous demande de défendre à tout prix telle personne, telle institution, telle ethnie ou telle formation politique.

Doit-on défendre à tout prix le nonce, le pape ou l’Église?

On peut et on doit défendre une personne ou une institution injustement attaquée. Je doute, par contre que Dieu nous demande d’être les avocats du diable, de défendre pour défendre. Jean-Paul II n’a pas défendu l’Eglise qu’il aimait quand elle était dans l’erreur. À la veille de l’année jubilaire (2000), il a demandé pardon pour tous les torts historiques causés par cette Église Ces torts sont la persécution des Juifs ou antisemitisme, les croisades, le procès de Galilée, les excommunications des réformateurs protestants Luther, Calvin, Hus et Zwingli, la traite des Noirs et les violences infligées aux Indiens d’Amérique, les injustices de l’Inquisition, de l’intégrisme, etc. Cela s’est passé le dimanche 12 mars 2000, lors d’une cérémonie solennelle dans la Basilique Saint-Pierre de Rome. Cette cérémonie etait appelée “Le Jour du Pardon”. Au cours de cette ceremonie, le pape a dit ceci: “Dans la Lettre apostolique Tertio millennio adveniente j’ai demandé qu’à la fin de ce second millénaire, l’Eglise prenne en charge, avec une conscience plus vive, le péché de ses fils, dans le souvenir de toutes les circonstances dans lesquelles, au cours de son histoire, ils se sont éloignés de l’Esprit du Christ et de son Évangile, présentant au monde, non point le témoignage d’une vie inspirée par les valeurs de la foi, mais le spectacle de façons de penser et d’agir qui étaient de véritables formes de contre-témoignage et de scandale.” À l’audience générale du mercredi 1er septembre 1999, le pape polonais avait deja déclaré: “Lorsqu’elles sont établies par une série d’enquêtes historiques, l’Église sent le devoir de reconnaître les fautes de ses membres et d’en demander pardon à Dieu et aux frères. Cette demande de pardon ne doit pas être perçue comme l’ostentation d’une feinte humilité, ni comme un reniement de son histoire bimillénaire certainement riche de mérites dans les domaines de la charité, de la culture et de la sainteté. Elle répond en revanche à une incontournable exigence de vérité, qui aux côtés des aspects positifs, reconnaît les limites et les faiblesses des diverses générations de disciples du Christ. L’attitude pénitentielle de l’Église de notre temps, au seuil du troisième millénaire, ne veut donc pas être un révisionnisme historiographique de façade qui serait par ailleurs aussi suspect qu’inutile. Elle porte plutôt le regard vers le passé et la reconnaissance des fautes, afin que cela serve de leçon pour un avenir de témoignage plus pur.” Tous les cardinaux et théologiens n’étaient pas d’accord pour que l’Église fasse son mea culpa, nous apprend le cardinal suisse Georges-Marie Cottier, qui fut théologien de Jean-Paul II, dans une interview accordée à Zenit, le 10 juillet 2012. Ils étaient contre la démarche du pape parce qu’ils croient à tort que l’Église ne peut se tromper. Or l’Eglise n’est pas sainte parce que clercs et laïcs sont saints mais parce qu’elle est habitée et conduite par l’Esprit Saint. L’Eglise est le corps du Christ certes mais elle est aussi une institution humaine. Or les institutions humaines peuvent se tromper, disait Luther. C’est cela la vérité. C’est fort de cette vérité que Benoit XVI a demandé pardon, le 11 juin 2010, aux victimes et à leurs familles pour les abus sexuels commis par des prêtres “à l’égard des petits” (Le Parisien du 12 juin 2010). Si je rappelle ces deux faits historiques, c’est d’une part pour montrer que l’Église n’est pas défendable dans toutes les circonstances, qu’elle doit se reformer sans cesse (“Ecclesia semper reformanda”) parce que les hommes et femmes qui appartiennent à cette Église sont pécheurs. La seconde raison, c’est que je ne veux pas que des gens bornés pensent que j’attaque Abekan. Je n’ai rien contre l’abbé Norbert Abekan; il n’a pas volé ma chèvre et je ne rêve nullement de faire le travail qu’il fait en ce moment.

Une défense de la dignité humaine à géométrie variable

Sur cette base, il devient plus facile pour moi de démonter les allégations d’Abekan sur le nonce apostolique, le pape et l’Église. Abekan affirme par exemple que “tout ce qui touche à l’homme, sa vie, sa dignité, ses préoccupations, ses soucis, ses angoisses, ses espoirs concerne aussi le Vatican et naturellement le souverain pontife qui a un profond respect de la dignité humaine”. Respect de la dignité de quel homme? Oui, l’actuel souverain pontife a défendu la dignité des Roms en s’opposant, le 22 août 2010, à leur expulsion de la France vers la Roumanie et la Bulgarie, ce qui obligea Sarkozy à demander une audience au Vatican pour s’expliquer. Et ce jour-là, j’ai applaudi des deux mains. Mais Benoit XVI n’a pas protesté quand le même Sarkozy a bombardé le palais construit par Houphouët-Boigny et tué les gens qui s’y étaient refugiés. À propos de bombardement, les États-Unis et l’ONU sont-ils allés en France pour larguer des bombes meurtrières sur Copé ou Fillon parce que tous les deux revendiquent la victoire et s’accusent de tricheries? Le pape allemand et le nonce apostolique ont-ils condamné l’embargo sur les médicaments et la fermeture des banques? Pour le pape et le nonce d’Abekan, la vie d’un Noir aurait-elle moins de valeur que celle d’un Blanc? Noirs, Blancs et Jaunes ne sont-ils pas les enfants d’un seul et même Père (le Père des Cieux)? Si on se dit disciple du Christ et qu’on ne défend que la dignité de l’homme blanc, on est dans le faux et on est tout simplement raciste. Jésus n’était pas raciste; les évangiles nous enseignent plutôt qu’il s’est mis au service de tous: Juifs et non-Juifs.

Norbert Abekan décrit le nonce apostolique comme “un homme très ouvert”. Mais ouvert à qui? Quand Ouattara et ses soutiens internationaux refusaient le désarmement alors que tous les accords le demandaient, que fit le nonce d’Abekan? Il se contenta de dire qu’il fallait aller à l’élection. Lorsque les deux candidats revendiquaient la victoire et que Gbagbo proposa un recomptage des voix par une commission internationale (cette proposition était la moins onéreuse, la moins dangereuse et la moins injuste), le représentant du pape demanda à Laurent Gbagbo de se retirer momentanément de la politique dans l’intérêt de la Côte d’Ivoire qui a besoin de paix pour se développer. Ce que je veux dire ici, c’est que le Vatican et le nonce avaient déjà choisi leur camp mais rien ne nous dit que ce camp était forcément le bon. Ce nonce “ouvert”, que pense-t-il des derniers rapports d’Amnesty international, de la Fédération international des droits de l’homme et de Human Rights Watch qui épinglent le régime d’Abidjan? Peut-il les qualifier de “songes et de mensonges”? Qu’a-t-il fait quand une cinquantaine d’églises catholiques ont été attaquées et profanées et que des prêtres ont été ligotés ou bastonnés? Comment réagit-il au rattrapage ethnique?

Pour conclure

Il y a quelques jours, l’abbé Abekan a joint sa voix à celles d’autres “hommes de Dieu” pour dénoncer la démolition par Cissé Bacongo de la clôture de l’Église des Assemblées de Dieu sise à Cocody-Riviera. Tout en saluant sa solidarité avec nos frères des Assemblées de Dieu, j’attire son attention sur le fait que, quand 73 déplacés du camp de Nahibly, le vrai Temple de Dieu, ont été massacrés (20 juillet 2012), il est resté muet comme une carpe. Pourquoi? Lui seul le sait comme lui seul sait qui a tenté de lui briser les jambes entre le Plateau et Cocody. Ce que je sais, moi, c’est que, si personne ne peut empêcher Abekan de soutenir tel ou tel politicien, il n’a toutefois pas le droit, en tant que disciple du Christ qui est la vérité, de pactiser avec le faux. Je le dis pour une raison simple: des évêques et prêtres qui avaient des accointances avec le faux (Vodun, homosexualité, franc-maçonnerie, Rose-Croix, etc.) ont été purement et simplement démis de leurs fonctions. Le pape a pris cette mesure gravissime en référence à la parole claire et ferme du Christ: “Nul ne peut servir deux maîtres” (Mt 6, 24).

Le père Jean-Claude DJEREKE


28/11/2012
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